En solidarité avec Charlie Hebdo: Charlie a aussi connu le Sahara Occidental, et les Sahraouis s’en souviennent
Agathe André était allée au Sahara
Occidental occupé par le Maroc à l’été 2005. Elle en avait rapporté un
reportage de deux pages, « Mohammed VI fait bouffer du sable aux
Sahraouis » que Catherine avait illustré dans Charlie. Une
première dans le journalisme français, à une époque où le black out
était total, encore plus total qu’aujourd’hui où quelques actions d’éclat comme
la grève de la faim d’Aminatou Haidar, en novembre-décembre 2009, ont permis de
lever un tout petit peu le voile.
Je vais mettre ci-dessous les liens
permettant de retrouver cette archive au parfum d’hier (il y a pratiquement 10
ans !), mais toujours d'actualité, et je ne résiste pas au plaisir de
reproduire ici, auparavant, quelques titres et paragraphes bien sentis :
UN SAHRAOUI RESPECTABLE EST UN
SAHRAOUI QUI S’ÉCRASE
Il est prié d’éliminer de
son vocabulaire les concepts inutiles comme « indépendance » ou
« autodétermination », qui produisent le même effet sur les forces
policières marocaines que l’ordre « Attaque ! » sur un pitbull.
[…]
« Les flics me disaient que
si je continuais à nier la marocanité du Sahara, panique Hamia Ahmed,
cabossé de partout, ils allaient violer ma mère et mes sœurs… » […]
Et puis, une opinion demeure
anecdotique tant qu’elle ne se discute pas collectivement, ni ne se partage
avec le monde extérieur. « Toutes nos associations sont interdites,
toutes nos rencontres sont clandestines », relate Brahim Dahane. […]
[…]
UN SAHRAOUI RESPECTABLE ACCEPTE
DE SE LAISSER ACHETER
« La méthode
des autorités marocaines est d’assimiler les Sahraouis éduqués : l’État
les recrute à la condition qu’ils acceptent de partir pour l’intérieur du
Maroc, et qu’ils ne reviennent pas avant cinq ans », explique Naama,
diplômé en droit. […] Hamoud, professeur de philosophie, confirme : « On
a voulu m’externaliser dans les écoles du Nord. Je n’ai pas accepté, mais à
Laâyoune, on refuse de me donner un poste. Je touche quand même un salaire, et
les Marocains ont raison de se plaindre de payer des impôts pour un Sahraoui
qui ne fout rien. »
[…] Pour préserver ses chères
« provinces du Sud », le Maroc consent effectivement depuis 1975
des sacrifices hallucinants, y investissant sept fois plus que la moyenne
nationale… […]
UN SAHRAOUI RESPECTABLE EST
AMNÉSIQUE
Il a tout oublié des
atrocités commises par Hassan II. Et se soumet, comme le reste du monde, devant
Sa Majesté Mohammed VI, qui a fait entrer, c’est bien connu, le Maroc dans la
modernité. Il vante ce VRP fréquentable, promoteur des libertés, cet humaniste
qui garantit le respect des droits de l’Homme, la séparation des pouvoirs et la
transition démocratique…
[…] « Le Maroc vit dans un
grand mensonge », s’énerve Addel Wahad, le corps couvert d’hématomes,
membre du Comité – interdit – sahraoui contre la torture et les mines
anti-personnel. « Que sont devenus les cinq cents Sahraouis disparus
entre 1975 et les années 1990 ? Tout le monde s’essuie sur Hassan II comme
sur un vieux torchon, mais les gradés qui nous torturent, comme El Aarbi Hariz,
le responsable de la sécurité à Dakhla, sont toujours là. » […] « Nos
familles ont été décimées par le père, et nous devrions encore nous taire quand
on voit nos enfants tabassés par le fils ? Nous n’avons plus peur, et
c’est ça qui dérange. »
Catherine a illustré avec quelques
dessins « réalistes » de tortures courantes, tel le « poulet
grillé » et l’« avion »…
Voici les liens :
Plus un petit encart de
« Conseil aux Sahraouis pour se faire entendre par la Communauté
internationale » (toujours venant d’Agathe André) :